Prédictions-voeux

Très bonne année à tous ! Nous vous souhaitons une belle année 2010, pleine d’idées et de projets !

J’hésitais pour ce premier billet de l’année à vous faire :

  • Soit des voeux “dans le vide”, pour vous souhaiter que des supers trucs et débrouillez vous 😉
  • Soit des prédictions ou pronostics dans la boule de cristal, comme celles de Fred Cavazza par exemple
  • Soit des “tendances” (un peu moins risqué !), comme celles, excellentes, de Vanksen

Je vais plutôt essayer de faire quelque chose qui soit un peu un mix des trois, avec mes voeux de projets et de tendances pour cette année ; ou en d’autres termes, les tendances, non exhaustives, mais que je trouve intéressantes et que j’aimerais suivre avec vous, à divers titres, pour cette année. Ca sera également l’occasion de relire quelques anciens articles, anciennes propositions d’idées, mais aussi de faire un peu de teasing pour des discussions à venir… C’est parti !

Réalité augmentée

Je vais commencer par quelque chose qui n’est pas tant une envie qu’une crainte : la réalité augmentée risque fort de devenir la tarte à la crème des actions marketing 2010. On va en bouffer et jusqu’à saturation… qui malheureusement risque d’arriver vite, à grands coups d’événements mal maîtrisés ou d’actions gadgets.

j’espère être agréablement surpris, mais je préférerai surtout ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain, et avoir en tête les usages où la réalité augmentée à un vrai réel intérêt : juxtaposer à la “réalité” (une version filmée en temps réel du site environnant) des informations complémentaires utiles. Et ne jamais oublier, lorsqu’on verra débarquer les trucs inutiles “marrants 2mn mais ensuite vraiment lassants” que ces nouvelles technos valent bien mieux que cela.

Vers l’Internet des données

Je casse les pieds à mes étudiants développeurs depuis des années avec ce bon vieux concept objet : séparer l’interface de l’implémentation. Séparer la donnée du métier, et le métier de l’interface utilisateur.

J’en avais déjà discuté dans cet article autour de la conf de Tim Berners Lee, l’Internet de demain va être orienté autour des données. Pures. Brutes. Qu’il faudra ensuite entretenir, exploiter, présenter. Un site tel que Twitter n’est finalement pas très loin de ce travail d’épure : tout tourne autour de l’axe “des utilisateurs/des messages émis-reçus par ces utilisateurs”. Deux tables, des téra-octets d’informations cumulés, une interface minimaliste (même si le site s’éloigne peu à peu de ce minimalisme…) et des APIs pour exploiter les données. Bon les gars, le Web de demain c’est nous, non ? Au boulot 😉

Convergences : la télé et le Web

Si il y a un mot dans le domaine des nouvelles technologies qui est usé jusqu’à la corde, c’est bien “convergence”. Je crois que dès qu’on a été capable d’afficher une pauvre vidéo de la taille d’un timbre poste et stocker deux ou trois images de qualité correcte, on a commencé à annoncer la convergence entre les différents médias, tous bien sûr autour du sacro-saint PC.

Et puis ? Et puis ben la convergence n’est pas vraiment là. Beaucoup ont usé temps, argent et sueur pour tenter de brancher l’interface miracle qui allait permettre de tout centraliser. En vain.

Du coup, le concept est un peu passé de mode, et fait sourire lorsqu’on le ressort des placards… Et pourtant…

Et pourtant les “Box” intègrent de plus en plus de services.

Et pourtant le numérique est maintenant omniprésent.

Et pourtant les ordinateurs contemporains sont suffisamment performants pour assumer tout ce flot de données. Ils le font déjà.

Et pourtant, surtout, les usages changent, évoluent. La télévision n’est plus le point central incontournable qu’il était. Le média reste immense, bien plus que n’importe quel site Internet. Mais de plus en plus de gens la regardent tout en gardant le notebook à portée de main. Surfent en même temps qu’ils regardent le film du soir. Se connectent sur les sites Web accompagnant les émissions.

La télé et le Web vont converger, et de plus en plus. Simplement, la convergence ne prendra pas la forme qu’on imaginait il y a quelques années. La convergence ne se fera pas au niveau du hardware : on se fiche bien d’avoir un écran unique, télé ou ordinateur. Tous de toute manière exploitent les mêmes technologies, les mêmes standards. La convergence se fera au niveau des contenus : on voit bien que les vidéos Web sont de plus en plus populaires, de la même manière que les shows TV arrivent de plus en plus sur le Web : toutes les télés font ou cherchent à faire aujourd’hui leur “hulu-like”.

Reste à inventer les sites qui sauront retrouver le meilleur des deux mondes, qui se ficheront de la provenance des contenus, télé ou web, pour se concentrer sur leur mise à disposition sur tous les devices de la vie numérique : écran de télévision, laptop, téléphone… J’en reparlerai.

Convergences : le Web et le téléphone

Autre type de convergence, où finalement l’essentiel reste encore à faire : le web sur son ordinateur et celui sur son téléphone. La solution la plus crédible qu’on nous propose aujourd’hui, est celle du Google Phone, qui, forcément, propose une passerelle parfaite : tout passe par des services Google ! Forcément, les agendas, les mails, etc… sont parfaitement synchronisés ! Et encore, le terme “synchronisation” n’est pas le bon, il faudrait plutôt parler de centralisation. Mais peut être “qu’un autre monde est possible”…

Pour vous donner un exemple simple : je consulte Twitter sur mon ordinateur, mais aussi sur mon téléphone lorsque je suis en mode “nomade”. Et j’ai un besoin simplissime : pouvoir reprendre sur mon téléphone la timeline là où j’avais arrêté de la lire sur mon ordinateur. Et vice-versa. Ben c’est pas possible. A chaque fois, je dois redérouler tous les tweets pour retrouver (approximativement…) là où j’en étais, en perdant à chaque fois du temps. Je crois que TweetDeck permet de faire ça, mais c’est bien le seul à ma connaissance.

Alors qu’une API extrêmement basique permettrait d’accéder sur le net à un serveur qui n’aurait pour unique but que de stocker la position précise où j’en suis resté (sous forme d’une heure correspondant à l’heure du dernier tweet lu, par exemple), et de délivrer cette même heure à quiconque en ferait la demande. Si possible sous forme d’une API publique et reconnue pour que n’importe quel client Twitter l’utilise.

Si on applique le même principe à la vidéo, on pourrait ainsi commencer à regarder un film ou un documentaire sur son téléphone (dans les transports publics, par exemple), puis pouvoir reprendre tout naturellement sa visualisation au chaud chez soi, confortablement installé devant sa télé.

Autre terrain de jeu, plus complexe mais aussi plus excitant qu’une simple API de synchro : le jeu. Lorsqu’un jeu sort sur PC, une déclinaison pour téléphone existe parfois. Mais aucune interaction ou presque n’est possible entre les deux. Je me souviens d’un projet d’une société clermontoise sacrément avant-gardiste, où les personnages manipulés par le joueur pouvaient se retrouver sur l’écran d’un PC ou d’un téléphone, et surtout passer de l’un à l’autre très simplement. C’était le même personnage, avec les mêmes caractéristiques, qui suivait le joueur lorsqu’il partait en vadrouille, et qui reprenait sa place une fois de retour à la maison. Le premier qui partira vraiment sur ce terrain aura entre ses mains à la fois le WoW et le tamagoshi des années 2010 !

API, API, API !

Seesmic a racheté ping.fm il y a quelques jours. Valeur ajoutée essentiellement de Ping.fm : leurs API. Quelques jours auparavant, c’était Twitter qui rachetait Mixer Labs, l’éditeur de GeoAPI. Tout est dit, non ?

Ca fait plusieurs fois que je le dis aux développeurs entrepreneurs en herbe : plutôt que de s’improviser à tout faire, faites ce que vous savez faire le mieux : un coeur d’application, des objets métiers, et une API pour pouvoir les manipuler. Ne pas s’embarrasser d’interface utilisateurs, de marketing alambiqué, si vous ne savez pas bien le faire, mais plutôt forgez avec l’âme d’un artisan une brique qui pourra amener une valeur ajoutée essentielle à un autre projet.

Depuis l’opensource, le Web 2.0, la communication à tout va, même les investisseurs, même les non-techniciens appréhendent aujourd’hui l’intérêt d’avoir une brique logicielle qui fasse un boulot bien précis, mais qui le fasse très bien. Et des tâches métier bien précises à accomplir, il y en a, et énormément.

e-commerce intelligence

L’e-commerce est aujourd’hui un terrain plus que balisé (voire peut être trop ?). Les sites référence sont là, les théorisations sont écrites, et chaque idée un tant soit peu originale doit être longuement soupesée par l’e-commerçant qui n’a qu’une crainte, légitime : perdre son client potentiel.

Et pourtant, il reste beaucoup à faire ; je reste encore frappé par l’immense gap entre la qualité de service d’un commerçant qui vous reçoit, vous conseille, vous aiguille, et la froideur extrême d’un site aux catégories bien alignées, mais où l’utilisateur est laissé à lui-même. On en arrive souvent à l’extrême, forcément très désagréable pour le commerçant, du client potentiel qui vient se renseigner en boutique, pour ensuite commander sur le net.

Je vois trois axes qui me paraissent intéressant à suivre :

  • Soit, lorsque c’est possible, amener un réel plus à la boutique Web qui la rende incontournable, que ça soit perçu comme une plus value par rapport à une boutique réelle (alors que la pauvreté des renseignements, et le fait de ne pas pouvoir “toucher” physiquement le produit, est le plus souvent perçu comme une moins value). C’était la piste que j’avais creusé avec “Ma pizza
  • Soit on crée des ponts entre boutiques virtuelles et réelles. Là aussi j’en avais parlé il y a quelques temps.
  • Soit on amène une vraie prestation de conseil “en ligne”. Un savant dosage entre ce que fait Gary Vaynerchuck pour WineLibrary (de l’humain mis en avant à fond les ballons) et l’utilisation de moteurs de conseil et d’aiguillage : des expérimentations ont déjà eu lieu depuis les débuts de l’e-commerce ou presque, mais rien de vraiment convaincant jusqu’à maintenant.

Pour cette troisième voie, je trouve intéressant de ressortir des cartons les vieux travaux d’intelligence artificielle des années 80/90. Les systèmes experts ont échoué à simuler une vraie intelligence humaine, en revanche, ils sont plutôt bien adaptés lorsqu’il s’agit de reproduire une sorte “d’arbre de décision” qui est parcouru lorsqu’on interroge le vendeur pour trouver “le” bon produit. On en recause bientôt.

Réinventer les interfaces utilisateurs

La sortie récente du Nexus One l’a montré : il n’y a pas de révolution à attendre du côté des téléphones mobiles dans les mois à venir. Plutôt le paufinage, la sophistication de ce qui a été défriché par l’iPhone en 2007 : le téléphone doit être un ordinateur à part entière, si possible sous Unix, complètement connecté, et avec une interface utilisateur faisant une large place au sensitif et à l’intuition.

En revanche, les TabletPC qui commencent à arriver risquent fort de généraliser ce qui est apparu sur les téléphones et sur des devices jusqu’ici isolés : une formidable ouverture d’esprit pour les interfaces utilisateurs, qui cassent le modèle que l’on connaît depuis les années 80, avec souris, menus, icônes, etc…

Jobs le disait il y a quelques années, ce n’est pas sur un ordinateur classique que les interfaces utilisateurs vont vraiment évoluer. Trop d’habitudes sont prises pour pouvoir faire complètement table rase. En revanche, tous les nouveaux devices qui sont en train d’arriver, et les téléphones n’en sont que les premiers exemples, sont un formidable terrain d’expérimentation, où tout ou presque est possible…

Il ne se passe pas une semaine sans qu’une avancée sur les interfaces utilisateurs se fasse. Le Litl, par exemple, propose une interface complètement épurée, proche de ce qu’on pourrait trouver sur un téléviseur.

Une place de choix est à prendre à qui saura monter une expertise autour de ce métier des nouvelles interfaces utilisateurs ; à mi-chemin entre ergonomie, utilisabilité, et avant-gardisme, les consultants “IHM” de demain auront un métier bien différents de ce qui se pratique aujourd’hui, avec tous ces sites et ces interfaces qui se ressemblent…

Et les autres…

Bien que (trop!) long, cet article reste très incomplet… J’ai voulu qu’il soit avant tout le reflet de mes envies à moi que j’ai ! Voici pour conclure d’autres tendances toutes aussi excitantes et sur lesquelles nous reviendrons bien sûr sur ce blog… :

  • Le Web temps réel : bien qu’assez gadget (le temps réel est là depuis le début ! moins les usages…), cette tendance risque fort d’amener des applications bien intéressantes dans les mois à venir…
  • Le cloud : j’en ai parlé plein de fois, donc je ne suis pas revenu sur le sujet, mais l’architecture “on the cloud” risque de changer pas mal les choses dans les mois à venir… surtout si l’on voit débarquer des systèmes d’exploitations conçus pour cet usage !
  • La géolocalisation : je l’ai dit, je ne crois pas à de grandes révolutions dans le milieu du téléphone mobile pour 2010. En revanche, les applications exploitant la géolocalisation risquent d’arriver en masse, avec la plus grande diffusion de devices le permettant. Jamais sans mon GPS !
  • Le social gaming : 2009 était l’année où le grand public a découvert les joies du jeu orienté “réseaux sociaux”, 2010 devrait voir arriver une nouvelle génération de jeux beaucoup moins rudimentaires et exploitant mieux les interactions multijoueurs

Joli programme ! Rarement les perspectives et les voies pertinentes et excitantes n’ont été aussi nombreuses, ya plus qu’à se retrousser les manches ! Très bonne année à tous !